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une photo, un clin d'oeil eternel
16 juin 2008

La crainte de l'image

Chroniques Noires et Blanches (2/3)
crainte
© PhotoAyour

          Amina, le voile bleu ciel laissait paraître son beau visage, les yeux maquillés au Khôl, se cachait de mon objectif lors de la nuit des noces de son cousin, un ami intime. " la photographie est Haram(1)", me disait-elle.
          Tifa, la plus belle de la classe, brune de 15 ans qui s'habille au techtonik style, redoute les appareils photo et les téléphones portables à caméra intégrée de peur de son frère aîné et d'une manipulation de la photo, "la où l'image peut détruire".
          J'aurais dû se faire casser mon unique appareil photo en pleine corniche à Tanger par un passant, un marocain résident à l'étranger. J'étais en train de photographier un bateau en plein détroit quand cet inconnu me hurla: "Hé? Hé? Hmar(2), je ne suis pas Britney Spears pour être suivi par des paparazzis". Je lui ai expliqué qu'il était hors champ de tir de mon 100-300 mm en vain. Un jeune inspecteur de police fit fin à ce scénario là.
           Une autre fois encore, dans les champs mon village natal, pendant la saison de la moisson, j'ai saisi un bel instantané pour Hadj Mimoun (3), un octagénaire, sans me voir. Après, j'ai décidé d'en lui parler en présence de son fils cadet, la trentaine, ami d'enfance, qui s'est sauvagement fâché et je n'avais que rembobiner la pellicule et la lui donner.
          Sans oublier mon arrestation par la gendarmerie royale et l'interrogatoire que j'avait subit pendant 20 minutes dans une petite bourgade non loin de l'Algérie. "Un espion?" Oh mon Dieu, je leur avait montrer une centaine de photos et un cahier de voyage pour me laisser partir, heureusement, avec mon appareil et sans accusation.

          Les gens craignent-ils la photo? Dans les quelques cas que j'ai cités, l'appareil photo fait peur. La pratique de la photographie au Maroc reste isolée dans les Studios et Labos photo, pour la documentation, mais en tant qu'un art, elle est en réalité mal comprise ce qui donne lieu à toutes sortes de préjugés et de stéréotypes.
          Les gens craignent-ils la photo? C'est sûr, mais pas toujours pour les raisons théologiques bel et bien expliquées par Regis Debray dans "Hayat assoura wa mawtiha" (4).


(1) Haram: illicite par le religion.
(2) Hmar: âne, le mot préjoratif le plus utilisé au Maroc.
(3) Hadj: pêlerin, surnom de celui qui a accompli un pêlerinage à la Mecque.
(4) Traduction arabe de "Vie et mort de l'image" traduit par Farid Zahi.

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Commentaires
P
Tatiana :<br /> Le climat semi-aride de la région de Missour, le soleil qui domine presque toute l'année créent ces teintes ocres.<br /> Roland:<br /> Si, nous sommes les miroirs où se refletent les silhouettes des autres et ils le sont pour nous.<br /> On ne peut ps fuire cette réalité.<br /> Too banal:<br /> Haram, Hmar, on peut même ajouter harim.. c'est bizzare cette coincidence.<br /> vous avez raison quant à cette hypocrisie, moi je pense que le problème réside dans la rigidité de discours religieux, ce que j'ai essayé de montré dans la 3ème chronique qui viendra.<br /> <br /> Merci pour vous tous, pour votre intérêt.
T
haram et hmar contiennent les mêmes lettres!<br /> Le haram est une invention de l'homme. Tout ce que le bon dieu a crée est licite. Les postures idéologiques face à l'image fluctuent d'une époque à l'autre et d'une région à l'autre. Quand l'interdit (l'iconoclasme) pèse sur l'image chez les musulmans, on trouve des représentations imagées bien osées chez les perses musulmans, dans les palais, les chambres à coucher et les salles de bain des rois!<br /> Chez nous, la monarchie (le roi est le prince des croyants) soigne son image de marque (les photos du roi et de la famille royale sont partout visibles!)...<br /> La peur de l'image est juste une superstition qui montre encore une fois que les marocains sont encore un peuple plongé jusqu'à hauteur de la cervelle dans l'irrationnel.<br /> Et ce n'est pas demain l'éveil...
R
Combien de regards croisés, combien de messages non partagés, combien d'envies de prises de vue ratées, comment vont-ils interpréter ce regard sur eux, comment respecter l'autre si on ne détecte pas un tout petit début d'accord ou d'échange ou d'esquisses d'un partage une fraction de seconde, chacun n'existe qu'au travers du regard de l'autre, inconsciemment, chacun regarde l'autre et, faire semblant de ne pas le voir, n'est-ce pas simplement refuser de partager l'espace qui nous entoure!<br /> Roland.
T
De jolies teintes !!!
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